L’aéroport international de Nouméa reste fermé alors que l’Australie et la Nouvelle-Zélande annoncent qu’elles évacueront les touristes à bord d’avions militaires.
Des centaines d’agents de sécurité supplémentaires rejoindront les 1 500 renforts déjà sur le terrain en Nouvelle-Calédonie après les pires troubles survenus dans le territoire français du Pacifique depuis plus de 30 ans.
Le Haut Commissariat de Nouvelle-Calédonie, qui représente l’Etat français dans le territoire, a déclaré mardi que 600 personnes seraient déployées dans les prochaines heures pour rejoindre les effectifs déjà envoyés par la France.
« Le retour au calme se poursuit sur l’ensemble du territoire », a-t-il déclaré dans un communiqué, ajoutant toutefois que l’aéroport de la capitale, Nouméa, resterait fermé aux vols commerciaux, la situation devant être réexaminée jeudi.
Le gouvernement a déclaré qu’environ 3 200 personnes attendaient de quitter ou d’entrer en Nouvelle-Calédonie lorsque les vols ont été annulés la semaine dernière, lorsque des violences ont éclaté au sujet des plans français visant à modifier les lois électorales pour permettre à un plus grand nombre d’arrivants récents de voter aux élections provinciales.
Six personnes ont été tuées après la mise en place de barrages de fortune dans les rues de Nouméa, l’incendie de voitures et d’entreprises et le pillage de magasins. Le Haut Commissariat a déclaré que des efforts étaient en cours pour dégager les barrières restantes et enlever les véhicules incendiés et autres débris.
L’Australie et la Nouvelle-Zélande ont envoyé leurs premiers avions militaires en Nouvelle-Calédonie pour évacuer leurs ressortissants.
Un avion C-130 Hercules australien a atterri mardi après-midi à l’aéroport Magenta de Nouméa, qui accueille habituellement le trafic intérieur, a rapporté l’agence de presse AFP.
« Les passagers sont pris en charge en priorité en fonction des besoins. Nous continuons à travailler sur d’autres vols « , a déclaré la ministre australienne des Affaires étrangères Penny Wong sur les réseaux sociaux, annonçant deux premiers vols.
Le ministre néo-zélandais des Affaires étrangères, Winston Peters, a quant à lui déclaré que le premier avion militaire rapatrierait « 50 passagers ayant les besoins les plus urgents » à Auckland. Il a ajouté que d’autres vols étaient prévus dans les jours à venir.
Effrayé
Ces troubles civils sont les plus graves qu’ait connus ce territoire de quelque 270 000 habitants depuis les années 1980. Ils reflètent les inquiétudes de la communauté autochtone kanak, qui représente environ 40 % de la population, qui craint que les changements apportés au système électoral ne diluent son vote et son influence politique.
Le mode de scrutin pour les élections provinciales a été établi dans l’Accord de Nouméa de 1998, résultat des troubles précédents, et excluait les Européens arrivés plus tard de France. En vertu du nouvel amendement constitutionnel, les personnes résidant en Nouvelle-Calédonie depuis au moins 10 ans auront le droit de vote.
Viro Xulue, qui fait partie d’un groupe communautaire fournissant une assistance sociale à d’autres Kanak dans le cadre de la crise, a déclaré qu’il s’agissait d’un retour à la guerre civile des années 1980 et que les gens avaient peur.
« Nous avons vraiment peur de la police, des soldats français et des milices terroristes anti-Kanak », a déclaré M. Xulue lors d’un entretien vidéo avec l’agence de presse Reuters.
Trois des six personnes tuées lors des troubles étaient de jeunes Kanaks et ont été abattues par des civils armés. Des affrontements ont également eu lieu entre des manifestants kanaks et des groupes d’autodéfense armés ou des milices civiles constituées pour se protéger, a indiqué précédemment le haut-commissariat de la France.
Les autorités françaises ont déclaré ce week-end que les forces de sécurité avaient démantelé 76 barricades érigées le long de la route de 60 km reliant Nouméa à l’aéroport international, mais l’AFP a rapporté que certaines d’entre elles avaient été reconstruites.
L’une d’entre elles était tenue par un groupe de Kanak masqués, dont certains portaient des catapultes artisanales.
Un jeune homme de 25 ans, masqué et portant des lunettes de soleil, qui n’a donné que son prénom, Stanley, a déclaré à l’AFP que le projet de réforme du mode de scrutin signifiait « l’élimination du peuple kanak ».
« C’est ce qu’ils ne comprennent pas là-bas : nous sommes déjà en minorité chez nous », a-t-il déclaré.