Le territoire du Pacifique a été secoué par des troubles liés au projet de Paris d’autoriser davantage d’Européens à voter lors des élections provinciales.
L’état d’urgence dans le territoire insulaire du Pacifique de la Nouvelle-Calédonie sera levé mardi matin, après deux semaines de troubles violents provoqués par le projet français de modifier les règles des élections provinciales.
L’état d’urgence imposé le 16 mai prendra fin à 20h00 lundi à Paris (18h00 GMT et 5h00 mardi à Nouméa), a indiqué le Palais de l’Elysée dans un communiqué dimanche soir, ajoutant que quelque 480 agents des forces de l’ordre supplémentaires seraient déployés sur le territoire en renfort des 3.000 personnels de sécurité déjà sur place.
La violence a éclaté en Nouvelle-Calédonie, où environ 40 % de la population est constituée d’autochtones kanaks, alors que le Parlement français s’apprêtait à discuter de changements constitutionnels qui permettraient aux personnes résidant sur le territoire depuis au moins 10 ans de voter aux élections provinciales.
Les critiques ont déclaré que l’amendement diluerait l’influence électorale des Kanaks et saperait l’Accord de Nouméa, l’un des deux accords politiques clés conclus à la suite de la dernière grande flambée de violence dans les années 1980.
Au moins sept personnes ont été tuées lors des derniers troubles civils, des barricades ont été érigées sur les principaux axes routiers et des sites commerciaux ont été pillés et incendiés.
La septième victime a été abattue par la police vendredi soir, peu après que le président français Emmanuel Macron se soit rendu dans les îles pour tenter de calmer la situation, promettant par la suite que l’amendement serait retiré.
La décision de M. Macron de ne pas renouveler l’état d’urgence montre la volonté de Paris d’entamer le processus de désescalade et de rétablir les conditions du dialogue, ajoute le communiqué.
La principale coalition politique indépendantiste, le FLNKS (Front de libération nationale kanak et socialiste), a publié un communiqué samedi indiquant que la priorité était d’apaiser les tensions et que la seule solution viable était « politique et non répressive ».
La levée de l’état d’urgence doit permettre au FLNKS de se réunir, précise le communiqué français, et la levée des barrages routiers est également une « condition nécessaire à l’ouverture de négociations concrètes et sérieuses ».
Aucune annonce n’a été faite sur le statut du couvre-feu nocturne imposé par les autorités locales en Nouvelle-Calédonie.
La police peine à contrôler certains quartiers de la capitale Nouméa, et l’aéroport international restera fermé au trafic commercial au moins jusqu’au 2 juin, a déclaré l’opérateur lundi.
La Nouvelle-Calédonie est gouvernée par Paris depuis les années 1800, mais de nombreux Kanaks n’apprécient pas le pouvoir de la France sur leurs îles et souhaitent une autonomie plus complète ou l’indépendance.
L’accord de Nouméa prévoyait trois référendums sur l’indépendance, qui ont eu lieu en 2018, 2020 et 2021, et qui se sont prononcés en faveur du maintien dans la France. Les groupes kanaks ont boycotté le dernier référendum, Paris ayant ignoré leurs demandes de report en raison de la pandémie de COVID-19. Ils ont demandé la tenue d’un nouveau vote sous l’égide de la communauté internationale.
L’accord de 1998 a également restreint le droit de vote aux élections provinciales dans le territoire, situé à l’est de l’Australie et à quelque 17 000 km de la France métropolitaine.
La France souhaite accorder le droit de vote à des milliers d’autres personnes non autochtones en étendant le droit de vote aux Européens arrivés en Nouvelle-Calédonie après 1998.
Lors de son voyage éclair en Nouvelle-Calédonie, M. Macron s’est engagé à ce que les changements prévus « ne soient pas imposés ».